Champignons: syndromes

Champignons et principaux syndromes toxiques

Conseils aux populations

  • Ne pas cueillir de champignons dont l’identification est incertaine.
  • Récolter le champignon dans sa totalité (chapeau, pied et volve éventuelle).
  • Notez les caractéristiques du biotope en cas de nécessité d’identification.
  • Ne pas les récolter à proximité de sites pollués (bords de routes, aires industrielles, décharges).
  • Le panier en osier peu profond et assez large est le récipient le plus adéquat. Jamais dans un sac en plastique (peut provoquer une décomposition des protéines par fermentation et la formation de substances toxiques (ex : putrécine, cadavérine, histamine).
  • Ne jamais les exposer à la chaleur (attention aux coffres de voitures).
  • Ne pas consommer de champignon dont l’identification n’est pas certaine. Au moindre doute, faire contrôler sa récolte. Certains champignons toxiques, voire mortels, ressemblent fortement à des champignons inoffensifs.
  • Déposer les champignons dans une caisse ou un carton. Ne les entassez pas, mais disposez-les de façon à ce que l’air circule librement, à l’abri de la chaleur.
  • Ne pas dépasser 48h entre la cueillette et la consommation.
  • En règle général, ne pas consommer les champignons crus.
    Seules quelques espèces en nombre très limité (ex : truffes, amanites des Césars) peuvent être consommées à l’état cru. Le risque d’échinococcose est également à prendre en compte.
    Beaucoup sont toxiques si consommées crues (ex : hémolysines de la morille).
    La cuisson ne détruit pas certains composés toxiques (ex : alpha-amanitine).
  • Ne consommer qu’une faible quantité. Même les espèces d’intérêt culinaire, consommées en grande quantité, peuvent entraîner des indigestions.

Orientation du diagnostic en fonction de l’aspect clinique

En l’absence d’une identification mycologique des espèces ingérées disponible en urgences, ce sont l’analyse du délai écoulé entre le repas et le moment de l’apparition des symptômes ainsi que l’analyse de ces symptômes qui permettent de s’orienter et d’adapter la prise en charge de l’intoxiqué.

La règle des 6 heures avait été mise en place afin de pouvoir évoquer suffisamment tôt l’éventualité d’un syndrome phalloïdien. Attention à l’interprétation en cas de repas successifs et/ou de mélanges de plusieurs espèces.

Toute intoxication à période de latence longue (≥ 6 h) doit être considérée, jusqu’à preuve du contraire, comme une intoxication grave et imposer l’hospitalisation du patient ainsi que de tous les convives ayant partagé le même repas.

Lorsque la période de latence est courte (< 6 h), qu’il n’existe aucun autre syndrome (ex : atropinique, muscarinique) et que les troubles digestifs sont modérés, un traitement symptomatique peut être mis en route, à condition de s’assurer de la régression des troubles digestifs dans les heures suivantes. La persistance de ces troubles, voire leur aggravation, peut faire craindre une intoxication mixte par deux variétés de champignons.

En cas d’appel au Centre antipoison, le toxicologue analyse la situation clinique du patient et le descriptif du champignon afin de déterminer la prise en charge de l’intoxication aiguë correspondant au syndrome suspecté.

Résumé des différents syndromes

1) Syndrome résinoïdien ou gastro-intestinal :

  • Espèces incriminées : très nombreuses espèces. Le plus fréquent des syndromes.
  • Symptômes : symptomatologie gastro-intestinale majeure.
  • Latence courte (15 à 30 min) et d’évolution favorable en 3 à 8 heures.
  • Traitement : réhydratation, correction des troubles électrolytiques.

2) Syndrome narcotinien ou psylocybien :

  • Espèces incriminées : Psylocybes, Panéoles
  • Symptômes : effets psychodysleptiques (ex : hallucinations).
  • Latence de 30 minutes et d’évolution généralement favorable en 4 à 12 h (dose-dépendant).
  • Traitement : repos, calme, benzodiazépine.

3) Syndrome coprinien :

  • Espèces incriminées : principalement les coprins (ex : coprin noir d’encre).
  • Symptômes : syndrome antabuse sévère (flush, hypotension à collapsus, tachycardie).
  • Latence : peu de temps après la consommation d’alcool.
  • Traitement : réhydratation, soutien hémodynamique si sévère, arrêt de la prise d’alcool.

4) Syndrome paxillien :

  • Espèces incriminées : Paxillus involutus (cru).
  • Symptômes : troubles digestifs suivis d’une anémie hémolytique aigue et ses conséquences.
  • Latence de 1 à 2 h.
  • Traitement : réhydratation, traitement symptomatique de l’hémolyse et de ses conséquences.

5) Syndrome panthérinien ou myco-atropinien ou muscarien ou anticholinergique :

  • Espèces incriminées : A. muscaria, A. pantherina.
  • Symptômes : syndrome atropinique avec symptomatologie digestive modérée
  • Latence de 30 min à 4 h et d’évolution parfois favorable en 24 à 48 h.
  • Traitement : réhydratation, benzodiazépines.

6) Syndrome muscarinien ou muscarinique ou sudorien ou cholinergique :

  • Espèces incriminées : nombreuses espèces d’Inocybes et de Clitocybes.
  • Symptômes : syndrome cholinergique (hypersécrétions) associé aux troubles digestifs.
  • Latence de 15 min à 2 h et d’évolution généralement favorable en 2 à 24 h.
  • Traitement : réhydratation, correction des troubles électrolytiques, atropine si sévère.

7) Syndrome hémolytique (autre que le syndrome paxillien ; non présent sur le Tableau 1) :

  • Espèces incriminées : morilles (Morchella esculenta, M. conica, M. rotunda, M. costata, …), uniquement lorsque consommées crues.
  • Symptômes : troubles digestifs suivis d’une anémie hémolytique aigue et ses conséquences.
  • Latence : 5 h.
  • Traitement : réhydratation, traitement symptomatique de l’hémolyse et de ses conséquences.

1) Syndrome phalloïdien :

  • Espèces incriminées : Amanites (A. phalloïde +++), Lépiotes, Galères. Représente la majorité des intoxications mortelles aux champignons. Il existe un test analytique spécifique permettant d’évaluer précocement le diagnostic : dosage de l’alpha-amanitine.
  • Symptômes : phase digestive cholériforme puis cytolyse hépatique et insuffisance hépato-rénale.
  • Latence de 6 à 24 h.
  • Traitement : réhydratation, silibinine (Légalon®), transplantation hépatique.

2) Syndrome gyromitrien :

  • Espèces incriminées : G. esculenta, G. gigas, G. infula.
  • Symptômes : troubles digestifs, neurologiques +/- atteinte hépatorénale.
  • Latence de 6 à 12 h.
  • Traitement : réhydratation, vitamine B6 (pyridoxine), anticonvulsivants.

3) Syndrome orellanien ou cortinarien :

  • Espèces incriminées : Cortinaires.
  • Symptômes : troubles digestifs, soif, myalgies, néphrite tubulo-interstitielle oligo-anurique.
  • Latence : 12 h à 14 j (médiane 3 j).
  • Traitement : réhydratation, épuration extrarénale, transplantation rénale.

4) Syndrome proximien :

  • Espèces incriminées : Amanita proxima, A. pseudoporphyria, A smithiana.
  • Symptômes : cytolyse hépatique et néphropathie tubulo-interstitielle (réversible à la différence du syndrome orellanien et d’apparition plus précoce).
  • Latence : 8 à 14 h.
  • Traitement : réhydratation, symptomatique.

5)  Syndrome de rhabdomyolyse :

  • Espèces incriminées : Tricholoma auratum (T. équestre (« bidaou »)), Russula subnigricans.
  • Symptômes : myalgies, rhabdomyolyse, myocardite, polypnée, détresse respiratoire.
  • Latence : 24 h à 6 j.
  • Traitement : réhydratation, symptomatique.

6) Syndrome acromélalgien :

  • Espèces incriminées : clitocybes (C. inversa, C. acromelalga, C, amoenolens).
  • Symptômes : douleurs, œdème, érythème et paresthésies des extrémités (mains, pieds).
  • Latence : 24 à 48 h.
  • Traitement : symptomatique (antalgique).

7) Encéphalopathie :

  • Espèces incriminées : Hapalophilus rutilans.
  • Symptômes : signes digestifs, vertiges, ataxie, somnolence, troubles de la vision, atteinte hépatorénale.
  • Latence : 6 h. Réversibilité en quelques jours.
  • Traitement : symptomatique.

8) Syndrome cérébelleux :

  • Espèces incriminées : morilles cuites, consommées en quantité importante.
  • Symptômes : syndrome ébrieux, confusion mentale, tremblements, vertiges, troubles visuels, céphalées ; les troubles digestifs ne sont pas constants.
  • Latence : 6 à 12 h.
  • Traitement : symptomatique.

9) Encéphalopathie convulsivante :

  • Espèces incriminées : Pleurocybella porrigens.
  • Symptômes : encéphalopathie avec convulsions survenue chez des insuffisants rénaux.
  • Latence : quelques jours à 3 semaines.
  • Traitement : symptomatique.

Sources :

1 VAPKO ; Association suisse des organes officiels de contrôle des champignons ; URL

http://www.vapko.ch

2 Flesch F. et Saviuc P. et al. ; Intoxications par les champignons : principaux syndromes et traitement ;  2004 ; Elsevier Masson.